raise your hand if I ruined your life ϟ ludwig

Then I look at you, and the world's alright with me. « J'ai peur... » « Tais toi, putain. » « Mais j'ai peur, Ludwig... »  « Aie peur en silence alors. »  Ses yeux le transpercent, sans la moindre pitié au fond des prunelles, alors qu'il secoue la tête tandis que Lukasz réprime difficilement ses larmes. Il a toujours été si fragile, si... Craintif. Ludwig, lui, est son exact opposé. A cet instant, il n'est qu'une boule d'impatience et d'excitation, et l'angoisse de Lukasz serait presque en train de lui gâcher son plaisir s'il en avait eu cure. Difficile de croire qu'ils sont du même sang. Pire, du même utérus. Pourtant, c'est bien le cas, et dans quelques minutes, ils seront tous deux âgés de sept ans. Techniquement, Ludwig l'est déjà, puisqu'il est arrivé sept minutes avant Lukasz, mais il faut encore attendre. Ils ne vont pas venir le chercher sept minutes avant, ce serait stupide d'avoir à revenir pour Lukasz. Alors, il attend. Il fixe sa montre, les yeux pétillants, son muscle cardiaque calqué sur le rythme de la trotteuse, et patiente, tâchant d'ignorer son jumeau qu'il sent trembler à ses côtés. Mais c'est peine perdu. Ce dernier fait tant bouger le lit qu'on pourrait croire qu'il fait une crise d'épilepsie. Avec un soupir, Ludwig passe un bras autour de lui sans un mot, jusqu'à le sentir se détendre. Voilà qui est mieux. Il peut de nouveau se concentrer sur l'immense joie qui le traverse. Car c'est aujourd'hui que leur vie commence. Enfin.

Ain't shady baby, I'm hot like the prodigal son. Le jour de son septième anniversaire, tout Murdarov devient officiellement un chasseur. Bien sûr, ils n'apprendront pas à chasser en une nuit, mais c'est à partir de cet âge, généralement après l'apparition de leurs pouvoirs magiques, que le rite initiatique démarre. Ils sont alors formés à l'art du combat... Jusqu'à être transformés en guerriers. Ce savoir-faire se transmet de génération en génération, de père en fils... Mais aussi de mère en fille. Valentin et Heleni Murdarov ont toujours su que le jour arriverait où leurs enfants devraient être aptes à prendre la relève, devenir à leurs tours des chasseurs, mais pas n'importe lesquels : les meilleurs. Des chasseurs de créatures magiques craints et respectés à la fois. Des êtres supérieurs, capables de devenir aussi bestiaux que des animaux. Des prédateurs chassant des prédateurs. Valentin a toujours vu cette force en Ludwig. Lukasz, lui, c'est différent. Il n'a pas les mêmes facilités, et a toujours levé les yeux vers son frère pour chercher son approbation, puis calquer son attitude sur lui, espérant voir apparaître la même lueur de fierté dans le regard de son père que lorsqu'il le regarde à lui... Mais c'est toujours le regard de Ludwig qui, en réponse, se posait sur lui, avec une bienveillance teintée de pitié, comme pour se faire pardonner, comme pour dire "c'est pas ma faute si je suis plus doué que toi". Et Lukasz s'est toujours tenu dans son ombre, car le fils prodigue, ça a toujours été lui.

Come on in, I'll be born again, born again as someone else. La perspective d'aller à Dursmtrang n'avait jamais ravi Ludwig, quand bien même cela semblait un mal nécessaire pour aspirer à plus de grandeur par le biais de l'accès à la connaissance. Il avait redouté son onzième anniversaire au moins autant qu'il avait attendu son septième. Cette fois, c'était lui qui appréhendait, contrairement à Lukasz qui acceptait sans rechigner ce voyage forcé loin des siens. Peut-être parce qu'il n'était pas seul, ou tout simplement car il aspirait à voir d'autres choses que leurs campements de fortunes et la traque incessante. Ce n'était pas le cas de Ludwig. Il ne voulait rien d'autre. Il ne vivait que pour ça. La chasse était son destin, et il ne voulait rien laisser l'en détourner, pas même ce passage obligé qu'était l'école de sorcellerie. Car dans ce monde ci, les rôles étaient inversés. Il n'était plus le meilleur. S'il apprenait rapidement, la théorie ne l'intéressait absolument pas : Histoire de la magie, Potions, Divination... Pire, SOINS aux créatures magiques ! Quelle était donc cette abomination ? C'était de la torture et, sans motivation, il ne faisait aucun effort pour réussir. Heureusement qu'il y avait quelques matières où il s'en sortait bien mieux, comme le Vol sur balais, la Défense contre les forces du mal, la Métamorphose et le Duel. Cela lui permettait de garder la tête hors de l'eau, mais il était loin d'être un bon élève. En revanche, et en dépit de son aversion pour les cours, l'école le transforma radicalement. Sortir du vase-clos familial lui fit énormément de bien sur le versant social et, sans trop d'efforts, Ludwig passa de taciturne et "bizarre" à populaire et apprécié. Il avait rapidement comprit comment fonctionnait les gens et sut comment gagner leur affection, avec son aura naturellement solaire, son expansivité et son humour communicatif. Pas en reste pour faire les quatre cent coups, il manqua plusieurs fois d'être viré, mais réussit par miracle à obtenir son diplôme.

Boy, we are family, no matter what they say. « Putain, aide moi, tu vois pas qu'elle m'étrangle ?! » Le regard de Lukasz passe de l'un à l'autre, sans savoir quoi faire. D'un côté, il y a Ludwig, son jumeau, à présent un grand gaillard dont la musculature s'est bien développée, maintenant qu'il va sur sa dix neuvième année. De l'autre, tout aussi âgée que lui, il y a leur cousine, Ivanka, plantureuse jeune femme, dont le bras bien dessiné est fermement serré autour du cou de ce dernier. Elle a le don de le glacer sur place, avec son regard clair acéré, et il n'ose faire un mouvement malgré les supplications de Ludwig, en mauvaise posture. « LUKE PUTAIN ! ELLE VA ME TUER ! » Désespéré, Lukasz jette un regard à Dimitri, jeune frère d'Ivanka de deux ans de moins qu'eux, qui se contente de pouffer en silence, un peu en retrait, simple spectateur de la scène. Lui non plus n'a pas l'air très disposé à vouloir aider son cousin. Bien qu'il voue à Ludwig une admiration sans faille, il a déjà choisi son camp, et Lukasz hausse donc les épaules, dépité. « Abandonne, Ludwig, elle t'a eu à la loyale. Et puis, j'te rappelle que c'est toi qui l'a provoquée... » tente-t-il alors, comme pour chercher un compromis et désamorcer la situation. La parole avant les actes, c'est du Lukasz tout craché, mais son jumeau n'a pas l'air convaincu du tout et lui renvoie un regard outré, faisant redoubler le rire de Dimitri. « ABANDONNER ?! Plutôt crever ! » cracha Ludwig, dont le visage devenait de plus en plus violacé. Lukasz soupira profondément, et c'est Dimitri qui prit le relais, trouvant malin de s'en mêler à son tour : « Tu sais, c'est pas si grave de se faire battre par une fille... » Cette fois, ce fut Lukasz qui pouffa, alors qu'Ivanka fronça les sourcils en accusant la remarque. Évidemment, le sous-entendu n'avait pas échappé non plus à Ludwig, qui ne manqua pas de s'engouffrer dans la faille. « Je sais pas pour qui ça doit être le plus vexant : toi parce qu'il sous-entend que t'es du sexe faible, ou moi parce que je me suis laissé battre... par la dite faible. Je cite, bien sûr. » Profitant d'un léger moment de relâchement, Ludwig se sortit finalement - et sans trop de difficulté - de la clé de bras, et put enfin respirer. Puis, à la surprise générale, il se tourna vers Dimitri tout en se massant la gorge, un sourire carnassier aux lèvres, apostrophant Ivanka. « On va lui montrer qui c'est les gros nases. » Après un rapide calcul, Dimitri choisit la fuite, et tandis que les deux se jetaient à sa poursuite en hurlant, Lukasz fila chercher Mikhayl, troisième cousin et aîné de leur fratrie... Contre les deux teigneux, Dimitri n'avait en effet aucune de chance de s'en tirer vivant.

Will you come along, cause I'm about to leave this town. uc.